Le MNAAG tend un pont insoupçonné entre le yoga et le soufisme

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Yogi en «posture de l’embryon» (extrait), illustration d’un manuscrit du Bahr al-hayat, École moghole, Allahabad, vers 1600-1604 / © The Trustees of the Chester Beatty Library, Dublin

«Yoga est un mot à la mode, pour le meilleur et pour le pire», écrit la présidente du Musée Guimet Sophie Makariou dans le présentation de l’exposition Yoga: ascètes, yogis, sufis. Ce nouveau rendez-vous avec les arts asiatiques fait la part belle de cette tradition issue de l’Inde ancienne. Mais, chose inattendue, l’exposition établit aussi une passerelle entre le yoga et la mystique soufie de l’islam. Exemple donc de métissage culturel à contempler jusqu’au 2 mai 2022 dans la magnifique rotonde de style néo-classique du musée.

«Traiter d’un tel sujet est à la fois une attente, une gageure et un piège», poursuit Mme. Makariou. «D’abord parce que le mot est devenu un fourre-tout dont tous s’emparent… Parle-t- on de pratiques, de textes fondateurs? Est-on seulement dans le domaine de l’ascèse et du renoncement ou aborde-t-on par-là l’épanouissement de l’être? Touche-t-on à la montée en puissance de l’hédonisme égoïste du début du 21e siècle? Quand faut-il placer exactement les origines du yoga? Quels ponts tend-il entre hindouisme, jaïnisme et islam?».

Les questions sont aussi vastes que le sujet. Le public ne trouvera peut-être pas toutes les réponses mais il pourra admirer l’exceptionnel manuscrit prêté par la Chester Beatty Library à Dublin: le Bahr al-hayat («L’Océan de vie»). Il s’agit du premier traité à décrire et commenter les plus anciennes représentations connues des 21 postures de yoga (asana). Ce document a été produit entre 1600 et 1604 par un prince moghol, musulman donc, Salim et futur Jahângîr, quatrième empereur de la dynastie moghol qui a régné sur l’Inde du XVIe au XIXe siècle.

Emmenée par les commissaires Amina Okada et Vincent Lefèvre, l’exposition réunit un ensemble de miniatures indiennes et de sculptures sur bois et bronze, du 10e au 19e siècle. En tout, 70 œuvres aussi précieuses que méconnues issues des collections du Musée Guimet, du Musée du Louvre, du Musée Rietberg de Zurich et d’autres institutions et fondations privées…

L’hindouisme a recherché l’équilibre entre vie mondaine et renoncement, notamment à travers la pratique du yoga. Via la mystique soufie, l’islam s’est également rapproché de ces traditions de l’Inde ancienne. C’est pourquoi les artistes de la période moghole ont accordé une place singulière à la figure de l’ascète et aux postures du yoga. D’ailleurs, l’exposition porte plus sur les représentations de l’ascétisme que sur les pratiques proprement dites.

Fuir le monde apparait très tôt comme un idéal dans les multiples courants religieux qui se développent en Inde. Cette aspiration au renoncement tient probablement à la croyance en la réincarnation, perçue comme une souffrance dont l’homme cherche à se délivrer. Celle-ci est liée à la causalité du karma –mot sanskrit qui désigne à la fois l’acte et ses conséquences. Bonnes ou mauvaises, les actions de notre vie déterminent une renaissance plus ou moins heureuse dans la suivante. Choisir la voie de l’ascèse devient alors un moyen de réduire l’enchaînement des causalités.

 

Infos pratiques

 

6, place d’Iéna 75016 Paris
Jusqu’au 2 mai 2022
Site internet