Africolor 2022 : chimères musicales et gorgones sonores

Fatoumata Diawara

Fatoumata Diawara / © Aïda Muluneh

 

Résolument « monstrueuse ». Voilà comme le directeur d’Africolor 2022 Sébastien Lagrave décrit l’édition 2022 de ce festival des musiques africaines. Jusqu’au 24 décembre, des sonorités venues de toutes les Afriques du monde vont remplir de rythmes et de couleurs plusieurs villes franciliennes. La programmation rappelle à la scène des « monstres » sacrés originaires des Caraïbes, de l’Océan Indien, du Brésil… PARISCOSMOP vous propose ici une sélection de concerts incontournables.

 

Fatoumata Diawara et Les Go de Bamako

Les Go de Bamako / © Samantha Nouvel

 

Le 3 décembre 2023

Maison des Arts de Créteil (94000)

 

La grande ambassadrice de la scène africaine Fatoumata Diawara propose un folk hypnotique et sensuel. Entre racines mandingues et rythmes modernes, elle navigue sur des ambiances jazz, blues et même pop londonienne. De sa voix teintée de blues, elle invite aux voyages et initie dans ses chansons une réflexion moderne sur son pays, le Mali. Comme un trait d’union entre deux générations d’artistes, Fatoumata sera accompagnée du tout premier girls band malien les Go de Bamako dont elle est la denba (marraine en bambara). Les Go donnent de leur voix tout autant qu’elles offrent un show total sans jamais rien lâcher. Une soirée 100% stars bamakoises sous le signe du partage et de la transmission.

 

 

Quatuor Béla et Cheick Oumar Koïta

Quatuor Béla et Cheick Oumar Koïta / © DR

 

Le 4 décembre

La P’tite Criée, Le Pré Saint-Gervais (93310)

 

Au départ, il y a la fascination pour la kora, les chants polyphoniques pygmées et le bolel éthiopien. Puis la rencontre avec le maître du djeli n’goni, Moriba Koïta, crée un pont avec le Mali et la tradition musicale des griots. Il est ici question de faire honneur au grand Moriba Koïta, décédé en 2016. Un honneur démultiplié car c’est sous les cordes de son fils, Cheick Oumar Koïta, que le djeli n’goni résonnera sur la scène. Une soirée hommage, de maître à maîtres, vibrante sous des cordes tendues vers tous les horizons.

 

 

Kin’Gongolo Kiniata et Jupiter & Okwess

Kin’Gongolo Kiniata / © DR

 

Le 10 décembre

Espace 93, Clichy-sous-Bois (93390)

 

Kin’Gongolo Kiniata est le nouveau son kinois mi-punk, mi- électro, porté en chœur par cinq commandos du rythme. Ils taquinent tout autant les tempos traditionnels congolais que la nouvelle sono techno mondiale. Les compos sont 100% homemade, à l’image des instruments, assemblages faussement débraillés de métal, conserves, plastiques. Le tout avec une batterie en conserves, une télé-drum ou encore une basse en plastique et planches clouées. Un combo de magiciens-recycleurs déjanté, grinçant, rebelle comme à Kinshasa. De quoi agiter têtes et neurones.

 

Jupiter & Okwess / © Youri Lenquette

 

Jupiter & Okwess arpentent les scènes mondiales chargés des rythmes du Congo mêlés au rock et à la funk. Ils sont prêts à tous les mariages musicaux et à toutes les invitations. Leur nouveau projet Na Kozonga est une décharge musicale explosive qui envoûte le corps et nourrit l’esprit. Na Kozonga, qui signifie « retour à la maison », rend hommage aux racines communes qui unissent l’Afrique et le continent américain. De la samba du carioca Rogê au rap du pionnier brésilien Marcelo D2, en passant par les cuivres du Preservation Hall Jazz Band de la Nouvelle-Orléans, Jupiter & Okwess n’ont pas peur des fusions insolites.

 

 

Fanmkika

Fanmkika / © Hurgon

 

Le 15 décembre

Théâtre Gérard Philipe, Saint-Denis (93200)

 

Le Gwo Ka est une musique née aux en Guadeloupe, du cœur et de la voix des esclaves africains. Accompagné de danses et de chants, le tambour Ka est l’expression de l’âme du peuple guadeloupéen, de son histoire et de ses contestations. Il est le fer de lance des Fanmkika, un groupe musical composé de femmes éprises de la musique Gwo Ka. Sur la scène, elles chanteront les œuvres des « Maîtres Ka », dans un élan de partage et la promesse d’une véritable Swaré Léwòz (soirée musicale) made in Pointe-à-Pitre.

 

 

Tamikrest

Tamikrest / © DR

 

17 décembre

Maison de la musique, Nanterre (92000)

 

La musique de Tamikrest (jonction, connexion en langue tamasheq) est née dans les sables, entre le Mali et l’Algérie, en 2006. Considérés comme les fers de lance de la nouvelle génération touareg, ces musiciens ouvrent de nouvelles voies entre le blues du désert et le rock occidental. Tous les membres viennent d’horizons divers (Mali, Niger, Algérie, France) et jouent une même musique. Ils ont trouvé dans la musique rebelle Ishumar les moyens de s’exprimer. Le groupe propose un rock vif et méditatif qui racontent le Sahara, les combats et l’extrémisme.

 

 

Yeko, Yohann Le Ferrand et Tina Traoré / Maïmouna Soumbounou

Yeko / © DR

 

Le 24 décembre

Théâtre Public de Montreuil, Montreuil (93100)

 

Le guitariste et compositeur breton Yohann Le Ferrand ouvre la soirée. Il  présente un nouveau projet nourri de sa rencontre musicale avec le Mali et ses grandes voix. Yeko (« la manière de voir » en bambara) crée des fusions Nord-Sud et puise dans l’énergie des cultures ancestrales. Le musicien est rejoint sur scène par la chanteuse Tina Traoré. L’extrême douceur de sa voix soutenue par le tamani se mêle au balafon. Le kamélé n’goni s’entiche des gimmicks d’une guitare funky… Une rencontre fraternelle pour un voyage world-pop quasi méditatif.

 

Maïmouna / © Valérie Dorpe

 

Maïmouna Soumbounou, l’étoile montante du Mali, a une voix virtuose. Celle que l’on surnomme « Oumou Sangaré junior » a en effet l’étoffe des grandes divas. Elle transporte dans sa voix les traditions ancestrales wassoulou en leur insufflant une vague de modernité à travers ses propres compositions. Un show made in Bamako à couper le souffle.

 

Plus que des concerts

Depuis sa fondation en 1989, Africolor est le plus grand festival de création autour des musiques africaines. Il est « une vitrine de l’Afrique vivante d’aujourd’hui : urbaine, cosmopolite, politisée, déchirée parfois, traversée par des conflits qui reflètent les appétits mondiaux, branchée sur la sono mondiale, mais aussi tournée vers son patrimoine, ses épopées, ses ancêtres ».

 

Le festival est le lieu des rencontres, confrontations, déceptions ou réjouissances, incompréhensions ou transes inouïes, expériences vivantes et vibratoires qui cassent notre rapport aseptisé à la scène et au son. Plus que des concerts, les soirées Africolor sont les croisements de tous ceux qui veulent vivre autrement les sons et les mots de l’Afrique présente, ici, ailleurs, d’hier et de demain.