Interview

Un nouveau festival de cinéma latino-américain débarque à Paris

Photograme film Trenque Lauquen

Trenque Lauquen, Laura Citarella, 2022 / © Capricci Films

 

Brésil, Colombie, Équateur, Mexique, Pérou… Tous ces pays latino-américains ont chacun à Paris un festival de cinéma. Pourtant, depuis le 11 avril 2023, c’est toute la région qui inaugure un nouveau rendez-vous cinéphile : Clap, le Festival de cinéma latino-américain de Paris. La programmation inclut 16 courts et longs métrages dont 8 en compétition. Un choix qui a un parti pris radical. Le Clap ne sélectionne que le cinéma d’art et d’essai produit en Amérique latine.

 

« Loin des perspectives culturelles, voire culturalistes, ou des enjeux de représentation et de représentativité, le festival CLAP s’intéresse avant tout aux formes cinématographiques, aux questionnements artistiques et esthétiques, qui sont certes également situés et politiques, mais dont ces derniers aspects sont contenus et exprimés formellement dans les œuvres ». Ce sont les mots du fondateur et directeur du festival Clap, le Colombien Carlos Tello. PARISCOSMOP s’est entretenu avec lui. Voici ses réponses à nos questions.

 

PARISCOSMOP :  Pourriez-vous nous parler de la genèse du festival Clap ?

 

Carlos Tello : L’idée c’était de créer un espace qui manquait à Paris pour le cinéma latino-américain d’art et d’essai. Un festival adapté aux caractéristiques d’un public parisien avec une sélection exigeante.

 

Qu’entendez-vous par cinéma d’art et d’essai ?

 

J’entends par art et essai une manière de faire du cinéma qui s’éloigne d’une manière industrielle de faire du cinéma. C’est à dire, le fait de faire des produits pour qu’ils soient consommés par les masses. Le cinéma d’art et d’essai se pose des questions sur lui-même. C’est un cinéma qu’intègre l’histoire du cinéma dans le sens de l’art et non dans le sens de la pure production industrielle des objets culturels et de consommation.

 

Quelle est l’originalité du cinéma latinoaméricain par rapport à d’autres cinématographies régionales ?

 

Je ne peux pas répondre cette question. Il me semble très compliqué de mettre des limites. C’est à dire, de définir quelque chose de si vaste… En plus dans une région où habitent plus de 500 millions de personnes. Je ne dirais pas non plus que chaque pays a son cinéma. Même à l’intérieur de chaque pays, il y a des manières différentes de faire du cinéma. Le cinéma d’art et d’essai est de l’art et on ne peut pas l’enfermer dans des bornes, des régions ou des frontières d’un pays.

 

Mon intérêt ce n’est pas d’établir une définition du cinéma latino-américain mais plutôt de montrer des formes, des auteurs, des cinéastes qui font un travail très différent. En regardant la sélection de cette année, on aurait du mal à identifier une ligne. Il y a des films très variés.

 

Néanmoins, il y a une chose factuelle qu’on peut dire du cinéma latino-américain : son essor actuel. Depuis quelques années il y a une multiplication de films, une émergence cinématographique très très importante.

 

Pourriez-vous nous donner un petit aperçu de la programmation ?

 

Nous avons huit films en compétition dont nous sommes convaincus de leur qualité cinématographique. Le film équatorien Barajas a ouvert la compétition du festival et ce n’est pas par hasard. C’est un film qui explore les rapports entre l’Amérique latine et Paris à travers des intellectuels qui habitaient à Paris dans les années 1960 et 1970.

 

Eami est un film très poétique d’une réalisatrice paraguayenne. Une construction cinématographique sur les rapports entre les hommes et les choses, entre les peuples autochtones et ce qu’on appelle la civilisation qui impose sa vision du monde.

 

Clementina est une comédie argentine tournée entièrement pendant le confinement. Anhell69 est un film d’un réalisateur colombien qui parle d’un groupe de jeunes gays à Medellín et qui sont à la croisée de multiples violences.

 

Trenque Lauquen est un film argentin monstre qui dure plus de quatre heures. Il vient de gagner le grand prix du festival de film de femmes à Créteil. Otro sol est un film chilien à la croisée entre le documentaire et la fiction, le passé et le présent, l’Europe et l’Amérique latine.

 

Et deux films encore. Une premier long métrage d’une réalisatrice brésilienne, É Noite na Amerique où on voit des animaux sauvages qui commencent à prendre place dans la capitale de la modernité qui est Brasilia. Et enfin, le film mexicain Dos estaciones qui lui aussi vient de remporter le grand prix du festival de Ciné latino à Toulouse.

 

Quelles sont les attentes de cette première édition ?

 

La principale attente est d’attirer dans les salles un public cinéphile, curieux, qui se pose des questions et qui s’intéresse au cinéma. C’est d’ailleurs le type de public que cherche le festival. Notre ambition est aussi de faire connaître le festival et de l’ancrer dans les différents agendas culturels. Qu’il soit connu et reconnu.