Fort en gueule et malheureux en amour. Tora-san, le protagoniste de la série C’est dur d’être un homme (Otoko wa tsurai yo), est l’un des personnages les plus populaires du cinéma japonais. Il va très probablement conquérir les cœurs des Parisiens pendant son long passage à la Maison de la culture du Japon (15e). À partir du 15 janvier et jusqu’en décembre 2022, la grande salle de la MCJP accueille les 50 épisodes de la série qui est toujours inscrite dans le Livre Guiness des records comme étant la plus longue de l’histoire. La petite exposition «Sur les pas de Tora-san» complète la rétrospective.
«Un peu de Bourvil, un zeste de Fernandel, un soupçon de Louis de Funès ne font tout à fait un Tora san», écrit Richard Collasse dans son Dictionnaire amoureux du Japon. Claude Leblanc, auteur du livre Le Japon vu par Yuji Yamada, affirme que «pretendre parler du cinéma japonais sans évoquer l’un de ses piliers [Tora-san], cela reviendrait à s’intéresser au théâtre français en oubliant parler de Molière. Pourtant, c’est ce qui est arrivé pendant de longues années en Europe où, pour diverses raisons, Tora-san et son créateur Yoji Yamada ont été négligés».
Héros national
C’est dur d’être un homme témoigne d’un regard subtil sur le Japon contemporain à travers les aventures amoureuses et familiales d’un camelot appelé Tora-san (monsieur Tigre). Ce personnage tragi-comique, héros national au Japon, nous emmène dans un doux vagabondage plein de péripéties. Au-delà de ses histoires de cœur qui finissent toujours mal, le célèbre colporteur a permis aux Japonais de (re)découvrir leur pays, ses paysages, les valeurs de ses habitants et l’évolution de leur société. À son tour, le public parisien aura l’occasion de sillonner tout l’archipel nippon à travers des contrées tantôt bucoliques, tantôt mélancoliques…
«Le scénario est toujours le même», consigne dans son dictionnaire Richard Collasse: camelot ambulant, Tora-san arrive dans une ville où il ne connaît personne pour écouler sa bimbeloterie. Il rencontre une «Madonna», une ravissante jeune femme désespérée qu’il invite lui rendre visite à Tokyo. De retour dans le quartier populaire de Katsushika, il est accueilli avec joie par sa demi-sœur mariée et leur fils, son vieil oncle et sa tante. L’accumulation de ses maladresses finit par indisposer sa famille et causer de violentes disputes. Entre-temps, la jeune femme lui rend visite. Il en tombe amoureux mais ne parvient pas à la séduire et elle finit dans les bras d’un autre. Le cœur brisé il repart pour de nouvelles aventures.
Sur les pas de Tora-san
Pour accompagner la rétrospective, l’exposition Sur les pas de Tora-san, située dans le hall d’accueil de la MCJP, met en lumière la série à partir d’affiches originales, de magazines et d’objets. Un parcours articulé en huit thématiques dévoile les points marquants: le contexte historique, la découverte des régions, les «madones », les guest stars, l’empreinte laissée…
Tora-san n’a pas pris une seule ride et son souvenir reste vif dans la mémoire collective des Japonais. Aujourd’hui encore il n’y a pas une semaine sans qu’une chaîne de télévision ne diffuse un des épisodes de la série. Shibamata, le quartier populaire de Tokyo de Tora-san, n’a pratiquement pas bougé. Les nombreux visiteurs qui s’y rendent tombent sur la statue du colporteur et celle de sa sœur installées sur le parvis de la gare. Ils peuvent aussi visiter le Musée Tora-san et participer, depuis 2015, au Tora-san Summit qui se déroule en novembre.
La série fait d’abord son apparition en 1968 sur la chaîne de télévision Fuji avec vingt-six épisodes. Elle finit en 1969 avec la mort du héros par une morsure de serpent. L’arrêt des aventures de Tora-san suscite un tel tollé que la société de production Shochiku reprend aussitôt l’histoire et l’acteur Atsumi Kiyoshi. Elle confie la réalisation des films au réalisateur Yamada Yõji, qui en réalisera la quasi-totalité entre 1969 et 1995. La série ne s’est arrêtée qu’avec la mort, cette fois-ci réelle, de son acteur fétiche en 1996.
Première rétrospective intégrale en dehors du Japon, toute la série est proposée avec une qualité d’image exceptionnelle en restauration numérique 4K.
Infos pratiques
101 bis, quai Branly 75015 Paris | |
À partir du 15 janvier et jusqu’en décembre 2022 | |
Site internet |