Flambant neuf. Le musée national de l’histoire de l’immigration s’est refait une beauté. Après trois ans de travaux, l’emblématique institution nichée dans le Palais de la Porte dorée (12e) rouvre sa galerie permanente le 17 juin 2023. Elle est plus grande, didactique et accessible au grand public et notamment aux plus jeunes. Chaque visiteur aura les éléments nécessaires pour comprendre pourquoi l’immigration est une composante essentielle de l’identité française.
« Nous avons besoin d’un musée de l’histoire de l’immigration parce que c’est notre histoire, celle de notre pays, dont l’identité ne se comprend que par une connaissance de l’histoire de celles et ceux qui y sont venus, des tourments qui ont accompagné ces arrivées, des réussites et des difficultés qui y ont succédé », écrit Constance Rivière, directrice générale du palais de la Porte dorée.
De son côté, Sébastien Gökalp, directeur du musée et commissaire de l’exposition permanente, ajoute « l’objet de ce musée est de contribuer à dissoudre les préjugés et à construire le vivre ensemble autant que d’incarner celles et ceux qui ont à un moment été étrangers et participent désormais de la communauté nationale ».
De 1685 au présent
Le nouveau musée propose une approche historique à partir de faits migratoires majeurs des trois derniers siècles. Il choisit un cheminement chronologique qui va de 1685 au présent. Au total, 11 dates clefs retenues pour leur épaisseur historique.
En 1685, Louis XIV signe l’édit de Fontainebleau qui interdit l’exercice public du protestantisme. Près de 100 000 huguenots (protestants calvinistes) quittent le pays. La même année est aussi la date de l’adoption de l’édit « sur la police des esclaves des îles de l’Amérique française », appelé plus tard « Code Noir ».
À 1685, suivent 1789 (les étrangers dans la Révolution française) ; 1848 (émigrants, exilés, colons et colonisés) ; 1889 (des étrangers aux immigrés) ; 1917 (de la Grande Guerre aux années 1920) ; 1931 (face aux crises) ; 1940 (étrangers et persécutés en temps de guerre) ; 1962 (reconstruction, décolonisations et migrations) ; 1973 (politisation de l’immigration) ; 1983 (luttes pour les droits et émergence de nouvelles frontières) ; 1995 (le temps de l’Europe) ; et le temps présent (entre hospitalité et fermeté : l’Europe face aux nouveaux conflits).
Toutes ces dates abordent des thèmes majeurs : les différentes migrations, l’évolution des statuts des étrangers, l’hospitalité et la xénophobie, le quotidien, l’économie, les mutations sociales et culturelles, l’intégration, les discriminations. On privilégie quatre axes : une approche chronologique et évènementielle ; une histoire des circulations à l’échelle locale, nationale et internationale ; l’évolution des statuts de l’immigré ; les expressions culturelles et l’épaisseur du quotidien.
De 800 à 1800 m2
Le parcours est désormais circulaire. Il a passé de 800 à 1800 m2 avec près de 600 pièces sur les plus de 7 000 que le Musée a dans ses collections. Papiers d’identités, photos, outils, objets personnels et de mémoire, contrats de travail… Ces éléments ont été donnés par des immigrés ou leurs proches. Ils retracent des destins singuliers qui illustrent de manière sensible les soubresauts de l’Histoire.
Le parcours est également jalonné d’œuvres d’artistes contemporains de la collection du musée : Kader Attia, Lahouari Mohammed Bakir, Taysir Batniji, Mohamed Bourouïssa, Gaëlle Choisne, Pascale Consigny, Claire Fontaine, Kimsoja, Samuel Fosso, Zineb Sedira, Barthelemy Toguo, Shen Yuan, etc.
Plus d’un Français sur quatre est issu de l’immigration
Les statistiques récentes montrent que bien plus d’un Français sur quatre est issu de l’immigration, qu’il soit immigré lui-même ou que ses parents ou grands-parents le soient. Mais ce que ne montrent pas les enquêtes, c’est qu’il n’est pas un seul Français qui ne soit pas concerné par cette histoire. « Le nouveau Musée est donc d’abord un musée de fierté nationale, qui raconte en textes, images, œuvres, parcours de vie, comment nous sommes devenus la France.
« Il n’occulte rien, il dit aussi tous les obstacles, il interroge la relation difficile à l’altérité, la peur de l’étranger, qui à chaque époque prend de nouvelles formes. Il confronte les préjugés d’aujourd’hui, il invite à changer de regard sur l’immigration pour retrouver le sens de l’ouverture. Il propose, en reposant sur des données objectives, de dépasser les polémiques qui trop souvent polluent tout échange sur l’immigration », conclut la directrice du palais de la Porte dorée.